La lutte de l’ARJEL contre les sites de jeux illégaux : mission impossible ?
Le 22/01/2010
Le projet de loi d’Éric Woerth sur l’ouverture à la concurrence des jeux d’argent en ligne vise non seulement à apporter plus de visibilité à ce marché, mais aussi à stopper les pratiques illégales majoritaires aujourd’hui. Cela sera-t-il réalisable ?
L’ARJEL, le « Judge Dread » des sites de jeux d’argent en ligne ?
On le sait, plus de 25 000 sites de paris sportifs et autres jeux d’argent sont accessibles depuis n’importe quel ordinateur connecté à internet dans notre métropole. Cela constitue un secret de polichinelle.
Le projet de loi instaure une autorité administrative qui a pour objectif de rechercher les sites illégaux et de les juger, en d’autres mots bloquer leurs accès. L’ARJEL possèdera donc les pouvoirs d’un juge, peut-on raccourcir. En filtrant ainsi les sites illégaux, les joueurs seraient contraints de se diriger vers ceux autorisés par la loi, c’est-à-dire les sites de jeux ayant obtenu une licence. Mais si ce filtrage par l’ARJEL entraînant une « liste noire » des sites illégaux pourrait en théorie fonctionner, en pratique il y a de grandes chances que ce soit un échec total. Et ce pour plusieurs raisons. Il est quasiment impossible de bloquer l’ensemble des sites illégaux qui sont présents sur la toile. En effet, il semble bien impossible qu’une seule autorité puisse bloquer l’accès à elle seule de 25 000 sites ! Près de 75% des paris se font sur des sites illégaux depuis des années, et cette part augmente mois après mois. Une autre raison est d’ordre économique : puisque le taux de fiscalisation imposé par l’Etat est bien supérieur à celui des autres sites, les cotes proposées seront beaucoup moins intéressantes et le potentiel de gains des joueurs serait de ce fait beaucoup moins important. Quel joueur sérieux irait s’inscrire sur un site qui, pour la même somme d’argent investie, gagnerait moins d’euros au final ? Le cauchemar de ces nouveaux sites « légaux » serait qu’ils soient tout simplement laissés à l’abandon et que les joueurs continuent de parier sur les sites « étrangers ».
Une sanction plus lourde contre les sites illégaux
Le texte examiné par la commission des finances a rendu son rapport le 19 janvier dernier. Le texte a été peu modifié dans l’ensemble, seules les sanctions prises à l’égard des sites ont été alourdies. Les sites illégaux ne pourront pas postuler à la licence délivrée par l’ARJEL, et ce pendant une période maximum de 5 ans. De plus, les responsables pourront se voir confisquer « biens mobiliers et immobiliers […] ayant servi directement ou indirectement à commettre l’infraction, où qui en sont, le produit ». Une sanction lourde puisque l’opérateur pourrait voir l’argent destiné au joueur confisqué et l’entreprise contrainte de fermer le site en raison des équipements confisqués.
En plus de ces mesures drastiques, les dirigeants pourraient se voir privés de certains droits comme celui d’exercer une fonction publique, commerciale ou industrielle. Ils seraient donc interdits en théorie de relancer une activité similaire dans le futur.
Pire encore, les sénateurs veulent même que le référencement sur les moteurs de recherche de ces sites soit supprimé. Une mesure qui pour tout expert est tout simplement irréalisable sur le plan pratique : le système du référencement par Google, pour citer cet exemple incontournable, étant secrètement gardé depuis une dizaine d’années. Les annonceurs ou partenaires du site incriminé seraient eux aussi sanctionnés d’une amende pouvant aller de 30 000 euros à 100 000 euros.
Enfin, elle a supprimé l’alinéa concernant la publication au Journal Officiel des condamnations délivrées par l’ARJEL des sites incriminés. Les sénateurs pourront maintenant débattre du texte dans son ensemble le 23 et 24 février prochain et procéder s’ils le souhaitent à d’autres modifications.