Nous ne pourrons plus accéder aux sites de jeux d'argent sans licence
Le 09/08/2010 | 1 commentaire
Les Fournisseurs d’accès internet (FAI) ont été condamnés vendredi dernier à bloquer les sites de jeux d’argent illégaux. Censure ou protection des joueurs en ligne ?
Une mesure difficile à appliquer
Le TGI de Paris a ordonné, vendredi dernier, aux FAI Orange, SFR, Bouygues Telecom, Free, Numéricable, Auchan Télécom et Darty de bloquer l'accès aux sites de jeux illégaux. Une sanction initiée par l’ARJEL qui tape ainsi un gros coup sur la table en réaffirmant son autorité. Mais cette décision ne sera pas facile à appliquer chez les FAI. D’un point de vue technique, il est très difficile de bloquer des sites, surtout les illégaux qui se surprotègent. Sur le plan financier, c’est un quasi gouffre budgétaire. Les bookmakers Centrebet et Interwetten, dans le collimateur de l’ARJEL, ont déjà dû se plier aux injonctions de l’Autorité en stoppant son activité en France.
Cette première mesure répressive vise surtout à dissuader les opérateurs étrangers non agrées d’exercer sur le territoire français. Cela peut servir d’exemple à l’autre autorité de régulation sur internet, Hadopi. En montrant sa force d’action, l’ARJEL prouve qu’une autorité peut sévir et ainsi relance par ce biais la peur d’Hadopi chez les internautes. Il faut dire que, comme prévu, Hadopi n’a été qu’un coup de bluff, le comportement des internautes n’ayant en rien changé.
Les FAI font grise mine
Jusqu’à présent, les FAI argumentaient leurs réticences au filtrage en mettant en cause sa difficulté technique et en renvoyant la responsabilité première aux hébergeurs étrangers des sites illégaux. Un argumentaire rejeté en bloc par le TGI jugeant que malgré l'absence de précisions sur les modalités de filtrage, la loi imposait aux FAI de « prendre toutes mesures de nature à permettre l'arrêt de l'accès au service en cause ». C’est à dire « toute mesure de filtrage, pouvant être obtenu (...) par blocage du nom de domaine, de l'adresse IP connue, de l'URL, ou par analyse du contenu des messages ».
Les juges ont également rejeté un décret selon lequel les FAI ont droit à un dédommagement pour les frais techniques du filtrage. Dans l'attente de sa publication, les FAI seront donc contraints d'instaurer à leur frais un filtrage des sites illégaux. Orange, filiale du groupe France Télécom et associé à la Française des Jeux sur le marché des jeux d’argent en ligne, n'a pour l’instant pas souhaité commenter cette décision avant d'en avoir eu une « lecture attentive ». Bouygues Telecom n’a également pas voulu faire de déclaration.
« Une atteinte à la liberté d’expression »
La Quadrature du net, une organisation de défense des droits et libertés des citoyens sur Internet, est déjà montée au créneau pour défendre les FAI. Elle considère ce filtrage comme une atteinte à la liberté d’expression et craint que « le blocage d'un site web par un fournisseur d'accès peut occasionner un ralentissement du trafic et un risque de censure collatérale d'autres sites hébergés sur le même ordinateur ». Son porte parole, Jérémie Zimmermann, explique que « sur un même serveur qui va se retrouver bloqué, vous pourrez trouver par exemple à la fois un site de poker non homologué en France et 100 blogs de dissidents iraniens ».
L’ensemble des associations de défense de la liberté du web dénonce une mesure de blocage inefficace. Mais surtout elles craignent que ce soit le 1er pas vers une censure globale de la toile par le filtrage d’autres domaines. Le filtrage serait-il inefficace ? Dans une affaire similaire, les FAI avaient été condamnés en juin 2005 à bloquer l'accès à un site négationniste. Cette décision avait ensuite été confirmée par la Cour d'appel. Le site incriminé, qui a ensuite changé de serveur, reste toujours accessible aux internautes français.