L’ouverture des jeux d’argent va coûter cher en communication
Le 11/04/2010
La loi sur la libéralisation des jeux d’argent en ligne doit inciter les opérateurs à rentrer dans la légalité, sanctionnant durement les sites illégaux. Pour se faire, elle durcit la législation et encadre les différents acteurs du marché, qui ne semblent pas ravis. Pourquoi va-t-il falloir du temps avant que cette régulation permette aux opérateurs de dégager de gros bénéfices ? Quels vont-être leurs coûts ?
Taux de taxation faramineux
La nouvelle législation sur les jeux d’argent prévoit un certain nombre de contraintes fiscales à respecter sous peine de ne pas recevoir la licence de l’ARJEL (Autorité de Régulation des Jeux en Ligne). Cette licence est délivrée gratuitement, pour une durée de 5 ans, si le cahier des charges est respecté. Cependant ce cahier des charges est très contraignant pour tout opérateur ayant pour ambition de rentrer sur le marché français. L’Etat prévoit notamment de taxer les mises des joueurs et non le Produit Brut de Jeux (PBJ), qui constitue le chiffre d’affaire, et ce à plus de 9%. Ainsi le régime fiscal pénalise, non seulement les opérateurs, mais également les joueurs. Même en tirant sur les marges, il n’est pas possible, avec ses taxes de maintenir le montant du taux moyen de retour aux joueurs. Il devrait donc être plafonné à 80% ou 85% des bénéfices, là où d’autres pays leur donne 90 à 95 % des mises. Pour contourner ces énormes taux de taxation, certains seront peut-être tenter de s’en passer, malgré les sanctions prévus.
La communication coûte cher
Afin ne pas sombrer sous les taxes, il faut être sûr de faire des bénéfices, et pour cela il est nécessaire de miser sur une stratégie de communication et marketing. Seulement voila, pour rivaliser avec des géants comme le PMU ou la FDJ, il ne faut pas, une fois de plus, lorgner sur les budgets. Emmanuel de Rohan Chabot, PDG de ZeTurf (spécialiste des courses hippiques) estime que sa société va « consacrer chaque année entre 16 et 20 millions d’euros de dépenses marketing pour faire connaître la marque. Soit 10 à 15 % du PBJ réalisé en 2009 ». La plupart des opérateurs sont ainsi persuadés que leurs deux premières années dans la légalité ne leur seront pas rentables. D’autant plus qu’ils seront extrêmement surveillés, la loi stipulant clairement que leur publicité ne doit en aucun cas toucher, de prés ou de loin, un mineur, ni présenter les jeux comme un moyen pour devenir riche. Les politiques sont conscients de ces difficultés mais s’en accommodent. François Trucy, sénateur et rapporteur du projet de loi au Sénat, affirme qu’il sait qu’il va y avoir des difficultés mais que la légalité doit primer. « Les opérateurs agréés vont connaître une concurrence importante pendant au moins un an. Ils vont se taper dessus à grands renforts de publicité, mais en cas de dérapage : la répression sera là ».
A qui cela profite-t-il ?
La loi stipule que l’ouverture du marché se fait uniquement sur internet, les opérateurs publics donc, tels que la Française des Jeux et le PMU conserveront leur position monopolistique sur le marché dur, c'est-à-dire dans les bureaux de tabacs, bar,… De plus, ils devraient être les premiers à obtenir les licences d’exploitation de l’ARJEL et sont déjà en train de développer leurs nouvelles plateformes. Pas étonnant alors, que ces acteurs historiques du marché ne se soient déclarés, dans l’ensemble, ravis des mesures annoncées qui, au final, ne concernent qu’une petite partie de leur chiffre d’affaire. Isabelle Parize, vice présidente de Mangas Gaming, a d’ailleurs récemment déclarée que seuls les monopoles pourront résister à de telles contraintes. « C’est une ouverture faite pour protéger le PMU et la FDJ ! » s’indigne-t-elle. De plus, le calendrier est très serré et beaucoup s’interroge sur la possibilité d’être près à temps pour la Coupe du monde de Football, le 11 juin, comme c’était censé être le cas. Les exigences techniques de l’ARJEL semblent difficilement réalisables rapidement. Surtout que la loi n’est pas encore prête à entrer en vigueur, elle doit encore passer devant la Commission Européenne, le Conseil d’Etat et le Conseil Constitutionnel avant que le Président de la République ne l’a promulgue officiellement et que les décrets paraissent au « Journal Officiel » de la République.