La FDJ découvre que son "Rapido" est addictif : étonnant, non ?
Le 23/05/2010 | 2 commentaires
La Française des Jeux assume enfin le danger que constitue son « Rapido » en matière de dépendance et vient d’annoncer la mise en place d’un nouveau jeu ayant pour vocation de le remplacer. Une démarche qui serait tout à son honneur si elle ne résultait pas d’un savant calcul.
Le Rapido, considéré comme le jeu le plus addictif
Le Rapido est depuis sa création considéré, par les plus grands spécialistes, comme étant un des jeux d’argent les plus addictif. Il attire plus de trois millions de joueurs en France dont 50 000 seraient dépendants.
Les facteurs favorisants la dépendance sont inhérents au fonctionnement même de ce jeu. Tout d’abord, il est accessible et facile de compréhension, ce qui est la caractéristique principale de plus ou moins tous les jeux de la FDJ. Mais surtout, il possède une ergonomie et une récurrence phénoménale avec un tirage toute les 2 minutes et demi, de 6h à 23h, diffusé en direct sur des écrans de télévision spécifiques. Pour finir, il a également une forte implantation rurale qui lui assure une certaine proximité avec les gens (un point de vente pour 14 500 habitants).
Ce jeu doit également sa dangerosité à l’absence de perspectives de gains conséquentes. Pour espérer gagner 10 000 euros, un joueur devra jouer 50 fois plus. Des statisticiens qui se sont penchés sur ce jeu d’un genre nouveau sont arrivés à des conclusions effrayantes. Selon eux, même un joueur de roulette aurait davantage de chance de gagner qu’un joueur de Rapido. C’est justement parce qu’il permet de perdre beaucoup sans jamais gagner de grosses sommes qu’il s’adresse à des joueurs compulsifs. Sans compter qu’à aucun moment, sur l’écran où défile les combinaisons, n’apparaît de message préventif concernant les coûts et les conséquences d’un tel jeu.
L’Amigo à la rescousse
On comprend alors pourquoi la disparition du Rapido ne saurait faire autrement que de coïncider avec l’apparition d’un nouveau jeu. La disparition d’une poule aux oeufs d’or comme ce jeu serait une perte énorme. Il faut dire que le chiffre d’affaire qui en a résulté en 2009 était de 1,702 milliard d’euros, ce qui le place devant le Loto. Ainsi, Christophe Blanchard-Dignac, PDG de la Française des Jeux, a annoncé mardi dernier le remplacement prochain du Rapido par l’Amigo.
Ce nouveau jeu qui mêlera informations, quizz de culture générale et tirage au sort devrait être testé dans 4 régions de France (Nord, Est, Aquitaine et Midi-Pyrénées) au début du mois d’octobre. On sait déjà que la fréquence de tirage sera réduite par rapport au Rapido, diminuant de cette manière les risques de dépendance. Monsieur Blanchard-Dignac espère avec ce jeu « capitaliser sur la convivialité ». Il a clairement révélé sur LCI que la FDJ voulait enterrer le Rapido à cause de son gros potentiel à rendre dépendant.
Un « timing » parfait
Il rendrait donc dépendant ? Depuis sa création, dans les années 90, tout le monde n’a de cesse de le crier, il semblerait que cela n’arrive aux oreilles de la Française des jeux que maintenant. Mieux vaut tard que jamais ? Certes, mais ce rebondissement n’est pas innocent. La FDJ ne tirerait pas un trait sur son jeu le plus rentable sans d’autres raisons.
Premièrement, sa politique affichée de jeu responsable. Depuis 2005, la Française des jeux s’est engagée à coup de charte et de plans d’action à informer et prévenir les addictions aux jeux. Une page entière est même consacrée à ses engagements sur son site internet. Alors évidemment, cela fait déjà 5 ans et la réaction est sensiblement tardive. Mais aujourd’hui, la situation a changé avec l’ouverture à la concurrence du marché en ligne. En effet, l’ARJEL a défini des critères simples que les futurs concurrents doivent remplir en vue d’une licence.
Ces critères sont notamment le développement de programmes destinés à mettre en garde les joueurs contre eux-mêmes et le jeu excessif. Un risque énorme donc pour la FDJ de voir son hypocrisie flagrante dévoilée au grand jour par des opérateurs en mal d’égalité de traitement et prêts en découdre. Ajoutez à cela que tout en conservant la première place en CA, le Rapido est en perte de vitesse depuis quelques années avec une baisse de 30% de 2007 à 2010 et vous obtenez l’Amigo. Un jeu censé concurrencer le CA du Rapido tout en prêchant le jeu responsable… A surveiller !