Quand les jeux d'argent mettent notre cerveau dans tous ses états
Le 06/07/2010
Pour savoir ce qui se passe dans notre tête entre la vue des machines à sous et l’issue du jeu, des chercheurs ont analysé les signaux émis par certaines zones du cerveau et qui varient en fonction des gains et des chances de victoire. Ils ont notamment découvert que certaines personnes auraient davantage de prédispositions génétiques à l’addiction que d’autres.
Quand on promet une récompense à son cerveau, ou l’« addiction sans drogue »
Devant les sigles défilant d’une machine à sous, le suspense monte et la tension est palpable, mais ce que nous savons moins c’est que notre cerveau aussi se met dans tous ses états. Avant même de connaitre le résultat final, votre cerveau à déjà anticipé la victoire et la déception en est d’autant plus retentissante.
Jean-Claude Dreher, de l’institut des sciences cognitives de Lyon, s’est penché avec l’aide de deux chercheurs du National Institute of Mental Health du Maryland, sur l’activité cérébrale liée à la possibilité de l’obtention d’une récompense financière. Ainsi, après avoir observé l’évolution de l’activité du cerveau le temps d’un jeu de hasard, ils ont déterminé des réseaux cérébraux liés d’une part, à l’anticipation d’une récompense financière et d’autre part, à la réaction de surprise ou de déception lors du résultat. Le cerveau réagit de la même manière pour chaque récompense, quelle qu’elle soit ! Sachez par exemple que pour votre cerveau, le sexe et la nourriture sont des récompenses de même nature que vos gains aux jeux ou même que certaines substances.
En effet, les scientifiques savent maintenant que les jeux d’argent activent les mêmes zones cérébrales que dans le cas de la prise de drogue. C’est pour cette raison que vous entendez parfois le terme « addiction sans drogue ». A part le fait qu’il n’y ait pas de substance ingérée, tout ce passe de la même manière pour le cerveau. Les spécialistes comparent d’ailleurs souvent la dépendance aux jeux à celles liées à la prise d’excitants.
La foire aux signaux dans votre tête avant le résultat final
Vous l’aurez compris, il faut oublier la notion de dépendance physique. L’addiction n’est autre qu’une maladie d’ordre neurologique. Les trois chercheurs ont observé l’activité cérébrale des joueurs de machines à sous pendant trois phases bien distinctes : la présentation des stimuli, c'est-à-dire des machines et des sommes mises en jeu, l’anticipation pendant le jeu et enfin l’obtention de la récompense. Ils ont ainsi pu constater qu’à la simple apparition des stimuli, des signaux de types transitoires apparaissent dans le cerveau prédisant déjà la récompense. Un signal qui réapparait ensuite quand la récompense perçue contredit finalement l’anticipation initiale, ce qui arrive presqu’à tous les coups. Cependant, si un joueur perd de peu, comme on peut le voir lors de partie de poker par exemple, il arrive que le cerveau n’interprète pas correctement la défaite et n’envoi pas ce signal contradictoire. Ainsi, même si l’on perd, le cerveau peu croire que l’on vient de gagner.
Mais ce n’est pas tout, le cerveau émet un autre type de signal, soutenu cette fois-ci, qui apparait pendant la phase d’anticipation de la récompense. Comme nous l’explique Jean-Claude Dreher, ce signal là « est le plus fort pour les récompenses ayant une chance sur deux d'être délivrées ». Notre cerveau calcule donc les probabilités de gagner et régule les signaux en circonstance, « Lorsque la probabilité de gagner augmente, chacun de ces signaux varie différemment ».
Un gène de l’addiction ?
Après avoir caractérisé les régions du cerveau humain qui s’activent pendant les jeux d’argent, l’équipe de scientifiques a étudié l’influence des facteurs hormonaux et génétiques impliqués dans les addictions aux jeux. Les résultats sont étonnants et constituent une véritable découverte. L’activation du système cérébral et de tous les signaux détaillés plus haut, dépend en fait de la version de gènes que l’on porte. Autrement dit, Jean-Claude Dreher a découvert que nous ne sommes pas égaux devant l’addiction et que la raison est génétique.
Le système de récompense du cerveau est activé par la dopamine. Or, deux gènes sont responsables du taux de dopamine disponible et leurs interactions entre eux sont différentes d’un individu à un autre. Autrement dit, chez certaines personnes ces gènes dégradent moins rapidement la dopamine et le système de récompense reste donc plus longtemps actif, encourageant ainsi à jouer. Les recherches ont aussi démontré que l’activité cérébrale change avec l’âge et que les personnes âgées sont moins sensibles aux récompenses donc moins enclines à devenir dépendantes.