Quand le débat sur l’ouverture des jeux d'argent devient politique
Le 27/01/2010
Avec la mise en place « laborieuse » du projet de loi qui régule l'ouverture des jeux d'argent en ligne sur le marché français, les politiques et les polémistes ont décidé eux aussi de s'emparer du sujet. Petit panorama des réactions politiques récentes.
L'argent d'abord, la prévention ensuite ?
Les intellectuels se sont mis de la partie puisque certains comme Denis Alland, avocat et professeur de droit à l'université Paris II Panthéon Assas, pensent que la soudaine envie de la part du gouvernement de faire passer son projet de loi sur les jeux d'argent avant la coupe du monde de football serait un moyen rapide de gagner de l'argent sur les taxes imposées aux opérateurs. L’Etat veut éviter à tout prix que les sites illégaux profitent seuls de cette manne d'argent. Cet appât du gain fait fi des autres mesures préconisées par l'Union européenne pour lutter contre l'addiction au jeu. Denis Alland regrette que de tels dispositifs ne soit réellement imposés aux États membres. Ainsi, les personnes les plus démunies et les plus enclins à ce type de jeux seraient donc lâchées dans la nature sans réelle protection.
Pour corroborer ce propos, on peut d'ailleurs signaler que certains professionnels du marché des jeux d’argent, comme Stéphane Courbit, étaient présents le soir de l'élection de Nicolas Sarkozy au Fouquet's. Nicolas Sarkozy a dû s'entretenir longuement avec l'actuel actionnaire principal de Betclic. La « figure montante du capitalisme » comme le qualifie Mediapart, dirigé par Edwy Plenel, volontiers critique à l’égard de Courbit et de l’origine de sa fortune. Il poursuit « toutes les grandes fortunes françaises veulent une part du filon », et « Stéphane Courbit a une longueur d'avance ».
« Si la loi n'est pas promulguée le 1er juin, ce sera le bordel »
En attendant, le sénateur UMP François Trucy, actuel rapporteur du projet de loi, a estimé mardi que « le calendrier était extrêmement serré » et exprimait ses doutes quant à sa mise en œuvre avant le 1er juin 2010. « Si la loi n'est pas promulguée le 1er juin, ce sera le bordel » a-t-il résumé crument la situation, rapporte le site du "Point". Les opérateurs commencent même à lancer leurs grandes campagnes publicitaires avant même que la loi ne soit passée.
Pour rappel, en 2006 déjà, Nicolas Sarkozy, alors ministre de l'Intérieur, s'attaquait aux publicitaires et à toutes les personnes « se livrant à la publicité en faveur de sites de jeux illégaux ». Le ministre de l'époque voyait déjà d'un mauvais œil la prolifération des sites illégaux basés à l'étranger ou sur le territoire national sans avoir a payé de taxes.
Le mirage du « nouvel eldorado »
Jean-François Lamour, autre rapporteur du projet de loi à l'assemblée, veut lui démystifier l'ouverture à la concurrence des sites de jeux d'argent en parlant de la réalité du marché : « La survie va coûter cher sur ce nouveau marché (…) seulement quelques poids lourds » pourront subsister. Nous sommes selon lui loin du « nouvel eldorado ». Si, selon lui, la question des jeux d'argent en ligne « reste très confidentielle et ne concerne que 2 à 3 millions de joueurs sur internet », il veut rappeler que le projet de loi impose aux nouveaux entrants sur ce marché de bien vérifier l'identité des joueurs au travers de documents officiels. De plus, le contrôle des échanges d'argent entre compte du joueur et compte bancaire permettra de s'assurer mieux encore de l'identité du joueur. Ces mesures sont selon lui beaucoup plus efficaces pour lutter contre l'accès au jeu des mineurs. Il rappelle qu'aujourd'hui un mineur peut très facilement se procurer chez un buraliste un de ces tickets et jouer comme bon lui semble.