«Le poker est aussi un sport car le physique compte énormément»
Par Jean-Sébastien HONGRE, romancier, le 21/04/2010
Jean-Sébastien Hongre est le directeur général de l’agence internet Planète Interactive. Comme beaucoup d’entre nous, le poker le passionne. Si bien qu’il a décidé d’en constituer le fondement de son premier roman, « Un joueur de Poker », dont internet a beaucoup parlé. Pour Kuzeo, il revient sur cette aventure.
Kuzeo : « Bonjour. Près d’un mois après la sortie de votre roman, largement relayée par la presse internet, quels retours avez-vous eu des critiques et des lecteurs ? »
Jean-Sébastien Hongre : Il commence à y avoir quelques critiques plutôt sympathiques sur Fnac.com et sur Amazon.com. Le bouche à oreille commence à fonctionner. J’ai aussi des retours sur mon groupe facebook et via mon éditeur. Tous confirment une tendance générale que je ne vais pas bouder : les lecteurs sont pris par le rythme du roman, joueurs ou non, ils plongent dans la vie d’Antoine et s’y attachent. Sur le site de la Fnac, le roman s’est placé dans les 15 premières ventes en ligne la semaine dernière. Sans doute la conséquence d’avoir été sélectionné « coup de cœur Fnac ». En somme, un bon départ !
J’ai eu quelques petits papiers dans la presse internet, un article positif de François Montmirel, un retour par mail de Michel Abecassis qui m’a vraiment touché. Bruno Fitoussi devrait en parler prochainement, peut être dans son émission. Il y a aussi Clubpoker.net qui m’a interviewé, et plein de blogs de joueurs qui ont amicalement relayé la naissance de mon cher « bébé » . La presse et les media traditionnels, à part en Picardie ma région d’origine, n’ont pas encore parlé du roman... Et aujourd’hui, il y a Kuzeo.com, et je vous en remercie !
« Pouvez-vous faire un petit "pitch" de votre roman à nos lecteurs ? »
Sur mon site Unjoueurdepoker.com, on trouve ce descriptif : « Découvrez le parcours initiatique d’Antoine, une quête de soi dans l’univers du poker, qui au delà du jeu nous pose la question de notre rapport au hasard et au destin. Parce qu’il se découvre un don pour le poker, Antoine, bientôt père, va voir s’ouvrir à lui un nouveau possible qui va le mener aux frontières de la raison. »
Le roman est donc avant tout le parcours initiatique d’un homme, Antoine, qui cherche à changer radicalement sa vie, et nous pose la question des limites que nous sommes prêts à mettre tous pour y parvenir. Bien entendu, tous le long du roman, il y a un parallèle la vie d’Antoine au quotidien et le poker, ce territoire où s’affronte la volonté de tout contrôler par les probabilités, l’observation, et la puissance inaliénable du hasard. Par son don, il va franchir une à une les étapes qui mènent à l’excellence, se sacrifiant pour y parvenir. Ceci pour le fond. Pour la forme, j’ai essayé de créer un univers tendu, une écriture « caméra au poing » pour qu’on soit emporté par l’histoire, une écriture proche de nos codes audiovisuels, impressionniste et littéraire à la fois. J’espère y être parvenu...
« L’origine de ce livre, c’est votre passion du poker ou le besoin de montrer un aspect différent de ce jeu, parfois mal vu ? »
En réalité, au départ, c’est plutôt le thème de cette lutte entre hasard et la volonté de chaque homme qui m’attirait, une lutte que chacun expérimente dans sa vie. Que peut la volonté sur le destin ? Comment contrôler sa propre vie ?
Le poker, une vieille passion pour moi, m’a alors sauté aux yeux comme le champ de bataille idéal pour y faire évoluer mon « Antoine », le personnage principal du roman. Cela m’a permis de montrer ce jeu sous des angles différents, notamment psychologiques, existentielles (ha ! Les terribles effets du bad beat) et faire tomber quelques préjugés, dans un sens comme dans l’autre. Et il y a bien entendu des clins d’œil que les connaisseurs reconnaîtront :).
« Beaucoup ont remarqué la dimension sociale du poker dont vous parlez à travers le personnage d’Antoine. Le jeu peut aussi être une façon de se construire ? »
Là, on aborde un point essentiel. Il faut déjà distinguer les différents types de jeu. Les échecs, le go, les dames développent sans aucun doute les qualités intellectuelles du joueur. La roulette me laisse perplexe pour ce qui est de se construire. Le poker est passionnant pour se situer entre rationnel et irrationnel. Il peut certainement aider un homme à se construire en développant les qualités d’un bon joueur de poker (patience, calcul mental, sens de l’observation) mais, pour un esprit trop jeune pas assez solide, il peut parfois être destructeur car il initie un dialogue direct avec le destin, avec « Dieu la chance » si j’ose le terme. Et se faire jeter pendant trois mois par Dieu en bad beat successifs peut à coup sûr fragiliser psychologiquement quiconque !
« Pensez-vous que le poker peut aussi être négatif pour certaines personnes ? Le conseilleriez-vous à tout le monde ? »
Probablement. L’addiction non pas au jeu mais à la réussite, le « toujours plus » promu par les écrans de télévision, peuvent amener certains trop loin, les enchaîner, les entraîner dans une spirale qu’ils ne contrôlent plus. Maintenant, celui qui flambera au poker aurait sans doute flambé à la roulette ou sur un site de trading. Celui qui progresse pas à pas, cherche non la chance mais travaille patiemment sa technique, et aspire au contrôle maximum sur ce qui se passe sur le tapis vert et dans son rapport personnel au jeu ne craint pas grand chose.
Ce qui est certain aussi, pour avoir connu quelques professionnels, c’est que leurs vies n’est pas simples et que ce « job » est difficile, ardu, et parfois très ingrat. Le plaisir du jeu disparaît souvent malheureusement car ils doivent s’industrialiser en quelque sorte. Ce schéma de vie est abordé dans le roman...
Pour ma part, j’ai de la chance, je n’aurais jamais le niveau pour devenir pro !
« Le poker est-il un jeu d’argent à part selon vous, voire un sport ? »
Les deux, sans aucun doute. Un sport car le physique compte énormément, le mental aussi, et l’hygiène de vie, notamment pour les tournois de plusieurs jours successifs. On est loin de l’image des joueurs en cigare, avec des verres de whisky et quelques belles serveuses pour leur servir...
Mais le poker est beaucoup plus ; c’est aussi l’apprentissage de soi-même, de la discipline qu’on doit savoir s’appliquer quand on joue et aussi quand il s’agit de ne plus jouer, d’arrêter, de sortir de la table pour quelques jours ou pour toujours. Cette discipline, selon moi, c’est l’apprentissage de la vraie liberté, le pouvoir de dire non, même à nos propres désirs.